la reine-chanteuse et le danseur [1]
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Günther Lanier, Ouagadougou 29 mai 2024
(deutsche Version siehe HandiFashion neu vom 22.5.2024)
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Des personnes vivant ou non avec un handicap présentent de la mode: habits, coiffures, bijoux. En plus, elles et ils font de la musique. Et dansent.
Une fête de l’inclusion.
C’était un samedi soir, le 4 mai. Lieu de l’événement: le Restaurant Koupadjana[2], un peu à l’ouest du centre-ville de la capitale burkinabè, non loin du Musée Nationale, très proche du Boulevard Thomas Sankara.
Pas seulement noire, mais en plus femme et vivant avec un handicap: Nous pourrions dire que Marie Claire Akoandambou fait l’expérience de trois handicaps dans sa vie de tous les jours.
HandiFashion remplace les anciens clichés de victimes passives, dépendantes d’aumônes, par de nouvelles images (et sons et mots) impressionnantes de femmes et hommes dynamiques qui façonnent la vie sociale de manière active et qui se font leur place à droits égaux si jamais cette place devait leur être refusée. L’événement a commencé avec les mots: «Ça décale à gauche, ça décale à droite, ça décale partout». Le handicap comme contribution fière à la vie sociétale et non plus une honte qui doit être cachée. Que c’est beau de sortir des normes !
Et oui, surtout beau: la musique et les collections de vêtements et d’accessoires (coiffures, bijoux). C’était la fête. Même si les temps et circonstances adverses imposaient un peu de modestie. Il faut s’éclater tant qu’on peut.
Un grand merci est dû au Club 0,7% et ses membres employé.e.s du ministère des Affaires étrangères. Ce Club 0,7% a financé HandiFashion – comme il a déjà, en 2023, financé la Caravane de sensibilisation et de plaidoyer pour l’Education Inclusive et le respect du Calendrier Vaccinal des Enfants[3]. Un «merci vielmals» spécial va à Michael König, le chef du bureau de la coopération autrichienne à Ouagadougou, membre du Club 0,7% – sans lui, HandiFashion 2024 n’aurait jamais vu le jour.
Voici un rapport en images de ce soir du 4 mai au Restaurant Koupadjana.
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HandiFashion, samedi 4 mai 2024, 20h, Restaurant Koupadjana
Cela a commencé avec un changement de programme. L’affiche (voir ci-dessus) avait annoncé qu’il y aurait un dîner à 19h. A ce moment, presque personne n’était encore arrivé.e. En lieu de ce dîner, il y avait un buffet après le défilé de mode où les participantes et participants de la soirée pouvaient déguster des résultats d’une formation en art culinaire pour les personnes vivant avec un handicap. Cette formation avait eu lieu pendant toute la journée au lieu de HandiFashion même – il s’agit bien d’un restaurant.
Le public de HandiFashion, après le défilé de mode, a aussi été conquis en matière culinaire – mais cela est hors-sujet.
Tout est prêt – et surtout la passerelle. Au cours de la soirée, le tapis rouge s’est avéré comme peu adéquat: comme il n’était pas fixé au sol, il se mêlait des jambes ou des roues de la chaise roulante ou de la béquille de plus d’un.e mannequin – et fut finalement enlevé. Photo GL.
Ici, c’est toujours Boubacari Kéré qui a la parole, le présentateur de cette soirée. Mais il est sur le point de passer le micro à la Reine (Akoandambou) pour son discours d’ouverture.
La première contribution musicale venait de Sam Sinaï, un des plus anciens soutiens de la Reine et membre du bureau de son association Claire-Vision. Du playback, bien sûr, presqu’aucun.e artiste a les moyens pour se payer un accompagnement live, ne parlons pas des cachets d’artistes.[4]
Puis la parole revenait à Amity Méria, une chanteuse connue dans tout le Burkina et qui a soutenu la Reine depuis ses débuts en tant que chanteuse. Elle a couronné HandiFashion 2024 en tant que marraine.
Et c’était parti pour le défilé de mode !
Ce mannequin est aussi connu en Europe en tant que danseur et acteur. Général Solo Beton alias Souleymane Démé a joué le rôle de GriGris, le rôle principal dans le film du même nom de Mahamat-Saleh Haroun, qui a été nommé en 2013 pour la Palme d’or à Cannes.
En ce qui concerne les vêtements, des créations de Dao Man et de Reine Akoandambou ont été présentées au public.
Inclusion: des non-handicapés aussi…
… peuvent réussir l’élégance.
Dao Man est un styliste renommé. Sa boutique «Dao Man Fashion» se trouve dans le quartier Sanyiri, à l’est de la SIAO et de l’aéroport.
Pendant que Dao Man est surtout connu pour ses habits masculins, la Reine Akoandambou travaille surtout sur des modèles pour femmes : complémentarité idéale pour ce défilé.
L’accès à la passerelle ne semblait pas tout à fait correspondre aux normes de sans-barrières…
Mais se laisser décourager n’est pas Burkinabè.
Sam Sinaï montre la direction à la plus jeune des mannequins.
Quel beau couple! La reine-chanteuse et le danseur, la photo du début de l’article en plus complet.
Mi-temps (après la première moitié du défilé): la Reine avec la moitié des mannequins (photo GL).
Il a fallu insister et encore insister pour que la star des stylistes Dao Man se joigne à ces cinq mannequins sur la “scène“ (photo GL).
Solo Beton, engagé en tant que mannequin, a aussi presté en tant que danseur. Entre autres, il a montré sa danse de la mitraillette connue à travers le film GriGris (voir ci-dessus).
Tout son poids repose sur sa bonne jambe…
… pendant qu’il transforme l’autre, l’«invalide», en mitraillette (ces trois photos sont de GL – excusez, s.v.p., la mauvaise qualité).
Nous avons beaucoup dansé ce soir de HandiFashion, avec béquilles, en chaise roulante, avec une jambe et demie, et même les non-handicapé.e.s se sont essayé.e.s à la danse. A droite en noir un des deux danseurs professionnels qui accompagnent la Reine lors de la plupart de ses prestations publiques. Lui et Solo Beton ont par la suite montré un très beau duo. Mais voici deux autres, pas des pros, mais tout autant féru.e.s de danse.
Un peu à l’écart de la passerelle, mais en pleine vue…
Si cette jeune femme en vert jaune passe à côté de toi et tu ne vois, comme cela m’est arrivé, que son haut du corps, tu croiras qu’il s’agit d’une fille bien solide de peut-être huit ou neuf ans.
Ses jambes ne semblent que tout juste la porter.[5]
Mais quand elle danse !!!
C’était une clôture très digne des belles prestations de cette soirée HandiFashion. Après, il y avait encore le discours de remerciements de l’organisatrice, Reine Akoandambou – des mercis à celles et ceux qui avaient contribué, au bailleur – le Club 0,7% – et au public.
Après cela, il ne restait qu’à ouvrir le buffet.
A l’écart de la passerelle, parallèle à elle, mais à l’air libre… photo GL.
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A la «Reine du Handicap», comme elle adore s’appeler, un grand Merci pour cette belle soirée & tout le meilleur pour la suite !
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Notes de fin :
[1] Reine Akoandambou et Solo Beton. Photo Landry Poyga. Les photos de cet article sont de lui sauf indication divergente.
[2] L’organisatrice de HandiFashion, Marie Claire Akoandambou (nom d’artiste Reine Akoandambou) n’est pas seulement chanteuse, compositrice, styliste, coiffeuse “avec les doigts d’or“, engagée dans la société civile (en premier lieu, mais pas seulement pour des questions qui touchent les personnes vivant avec handicap), mais aussi une excellente cheffe et depuis bien d’années gestionnaire d’abord de kiosks et maintenant de restaurant.
[3] Voir Günther Lanier, Le show et la Reine au service des vaccins et de l’inclusion, Ouagadougou (Africa Libre) 29 mai 2023, https://www.africalibre.net/articles/509-le-show-et-la-reine-au-service-des-vaccins-et-de-l-inclusion respectivement Vienne (Radio Afrika TV) 29 mai 2023, https://radioafrika.net/le-show-et-la-reine-au-service-de-vaccins-et-inclusion/.
[4] Dans le pays entier, il est connu pour sa chanson sur la polio qu’il a écrite il y a peut-être vingt ans. Lui-même n’en a pas été victime – il n’a qu’un seul bras.
[5] Ces six photos sont encore de GL – je demande une fois de plus, d’excuser la mauvaise qualité. Le photographe est évidemment passé à côté de cette danse.
Sur la 4e et 5e photo, une autre personne est vaguement visible derrière la danseuse: au Burkina, si tu aimes la prestation d’une danseuse ou d’un danseur, tu vas la (le) joindre sur la scène, tu danses avec elle ou lui, en offrant, pour ainsi dire, une deuxième «voix» d’hommage. Ici, il s’agit de Maria, la petite sœur de la Reine, qui le fait.