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CLIF ou Sortir de l’ombre

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Marina Pfaffernoschke, “Le citron vert“, détail [1]

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Günther Lanier, Ouagadougou 17 mars 2023

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Au Burkina Faso, la Journée internationale des Femmes, le 8 mars, est une institution bien ancrée dans la conscience de toutes et de tous – et elle est bien sûr fériée. Même si, aujourd’hui, elle n’est plus autant prise au sérieux que pendant la révolution sankariste quand c’étaient vraiment les hommes qui faisaient le marché, s’occupaient des enfants et faisaient la cuisine, il serait toujours impensable d’escamoter cette interruption du quotidien patriarcal une fois par an. Une partie emblématique de la fête sont les pagnes 8 mars hauts en couleur, conçus et produits nouvellement chaque année. Qui peut – surtout, mais pas seulement les femmes – s’en fait tailler une robe, un boubou, une chemise et se pavane avec le jour de la fête.


pagnes 8 mars, encore emballés, un mois avant la fête, à la Cour de Solidarité de Paspanga [2]

Vue la situation difficile du pays, le ministère de la femme[3] n’a exceptionnellement pas soutenu la production de ces pagnes en 2023. Qu’il n’y ait pas de cachet officiel n’aurait dérangé personne. Comme d’habitude il y avait trois variantes au choix. Mais on les payait plus cher que l’année dernière en absence de subvention ministérielle.

Il va sans dire que le Club International des Femmes de Ouagadougou a lui aussi fêté le 8 mars. A midi, dans un cadre exquis, un buffet était offert aux membres du club, à leurs partenaires et à Apolline Traoré en tant qu’hôte d’honneur. Peu avant, cette dernière avait, pour son nouveau film «Sira», engrangé plusieurs prix dont l’Etalon d’argent au Fespaco, l’illustre Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou qui se tient tous les deux ans. Un peu avant cette «médaille d’argent» de la production cinématographique du continent, le prix du public lui avait été décerné à la Berlinale, le festival du film international à Berlin.


Apolline Traoré raconte les difficultés du tournage de “Sira“. Au centre de la photo, de profile, la présidente du Club des Femmes, Alexandra Vetter, et sur la gauche, aussi de profile, la vice-présidente du Club, Rosena Sebelin [4]

A cette fête du 8 mars, on n’a vu que la bande annonce du film primé. Mais nous savons qu’il va bientôt passer dans les cinémas de la capitale burkinabè – les deux projections au Fespaco avaient été désespérément surbookées, on avait tellement parlé du film ! Ce qui n’est pas surprenant, vu qu’il traite d’un thème d’une actualité brûlante au pays, l’insécurité causée par le terrorisme. Ce qu’il fait en rendant hommage, à travers son héroïne Sira incarnée par Nafissatou Cissé, à l’engagement féminin, envers et contre toutes embûches et difficultés.

Cet engagement, nous le connaissons bien des femmes à travers le monde et au Burkina peut-être encore plus[5]. Le comble : le plus souvent, la contribution des femmes est peu appréciée.

Pendant le Fespaco, le Club des Femmes avait organisé une sortie pour ensemble aller voir le film documentaire «MK, l’armée secrète de Mandela» d’Osvalde Lewat, une franco-camerounaise dont le film est un hommage à l’ancien ANC aux positions radicales dans sa lutte contre l’apartheid, positions largement abandonnées lors de son accession au pouvoir, avec Mandela comme figure de proue[6].


possibilité d’échange avec la réalisatrice Osvalde Lewat après la projection au Ciné Burkina [7]

Le CLIF, Club International des Femmes de Ouagadougou, est une association qui existe depuis plus de vingt ans[8]. Au-delà de l’organisations de rencontres et sorties, il soutient plusieurs petites associations et institutions dont la Cour de Solidarité de Paspanga, où des femmes accusées de sorcellerie et chassées de leurs villages et familles trouvent refuge. Si, dans le temps, il s’agissait en premier lieu d’un cercle d’épouses de diplomates, le Club sous sa présente direction vit une apogée. Expats autant que Burkinabè peuvent adhérer, des hommes intéressés aussi, même si une cotisation annuelle de 30 000 F Cfa (46 euros) représente un seuil considérable pour la grande majorité des femmes burkinabè.


Exposition “Le CLIF montre sa créativité“ le 12 mars 2023 dans la capitale burkinabè ; tout à fait à droite Ariane Zeba; à ses côtés : Marina Pfaffernoschke [9]

Mais c’est l’exposition qui a eu lieu dimanche à Koulouba, au centre de Ouagadougou, qui m’a poussé à écrire cet article. Dans le beau cadre de l’ancienne résidence de l’Union Européenne, des membres du CLIF exposaient leurs œuvres. Avec un accompagnement professionnel, elles s’étaient activées artistiquement de manière plus ou moins régulière pendant un bon bout de temps. Les résultats ne sont pas seulement présentables – ils devraient être montrés à un public beaucoup plus grand.


Alexandra Vetter, présidente du CLIF, “La récolte“

La qualité considérable des œuvres exposés met une fois de plus en évidence combien de potentiel est caché «à l’ombre» et souvent, sans doute, s’y atrophie ; combien il est nécessaire que les femmes – même vivant dans des conditions sociales privilégiées – sortent de l’ombre de leur huis-clos, sortent au grand jour.


Pour moi le fleuron de l’exposition : Rosena Sebelin, vice-présidente du CLIF, “Le Réel“

Comme si les beaux-arts ne suffisaient pas, la présidente du CLIF nous a en plus offert un petit concert. Elle-même au violon s’est faite accompagner au «piano» par la compositrice japonaise de renom international Keiko Fujiie, qui vit au Burkina depuis quelques années et nous présentera d’ici peu en première mondiale son nouvel opéra «africain»[10].


Alexandra Vetter au violon, Keiko Fujiie au clavier; à gauche, de derrière et en train de filmer: Marina Pfaffernoschke, la créatrice de la photo qui précède l’article.

Voyez-vous sur la photo ci-dessus le portrait de la vieille sur le pilier à gauche ? Il s’agit de la maman d’Ariane Zeba, membre du CLIF. La fille y a donné une autre vie – sur une toile – à sa maman. Permettez-moi de conclure cet article avec une photo d’elle, peut-être l’aînée parmi le public de l’exposition du dimanche. Fille du premier président, en 1948, d’un parlement burkinabè (alors haut-voltaïque), Georges Konseiga[11], elle vit maintenant à nouveau au Burkina. Ses expériences, ce qu’elle a vécu entre l’Europe et l’Afrique mériteraient sans aucun doute une biographie propre.

Et cela vaut pour beaucoup d’autres femmes, trop peu ou pas connues, femmes qui restent à l’ombre.

Dans leurs pays hôte, les expats sont presque toujours des phénomènes éphémères. Dans le cas d’Alexandra Vetter et pour le Burkina, c’est particulièrement dommage. Pour son avenir ailleurs, qu’elle entamera dans beaucoup trop peu de temps, nous lui souhaitons tout le meilleur. Qu’elle continue de faire profiter son environnement, son monde de ses énergies quasiment inapprivoisables et de ses talents multiples, artistiques, sociaux et autres ! Quant au CLIF, puisse-t-il rester aussi actif, performant et prospère sous ses successeures !

* * *

Notes de fin :

[1] Photo GL 12 mars 2023.

[2] Photo GL 11 février 2023.

[3] Ministère de la Solidarité, de l’Action humanitaire, de la Réconciliation nationale, du Genre et de la Famille.

[4] Photo GL 8 mars 2023.

[5] Voir Günther Lanier, Au pays des femmes intègres, Ouagadougou (CEPRODIF) 2020. Seulement pour les germanophones : Günther Lanier, Land der Integren. Burkina Fasos Geschichte, Politik und seine ewig fremden Frauen, Linz (guernica Verlag) 2017 (disponible seulement à la maison d’édition: [email protected]).

[6] Winnie Madikizela-Mandela en a entre autres fait les frais, ne voulant pas trahir les anciens idéaux (et Mandela a par la suite épousé Graça Machel). En ce qui concerne Winnie Madikizela-Mandela, voir Günther Lanier, Der südafrikanische Tod der Revolution. Von Winnie zu Ramaphosa (La mort sudafricaine de la révolution. De Winnie à Ramaphosa), Ouagadougou (Africa Libre) 20.12.2017, https://www.africalibre.net/artikel/349-der-sudafrikanische-tod-der-revolution-oder-von-winnie-zu-ramaphosa.

[7] Photo GL 3 mars 2023.

[8] Le CLIF n’a pas de site web mais une page Facebook : https://web.facebook.com/ClubInternationaldesFemmesdeOuagadougou?locale=fr_FR.

[9] Cette photo ainsi que les suivantes : GL 12 mars 2023.

[10] J’ai plusieurs fois fait état des étapes préliminaires de cet opéra : Günther Lanier, Fünf Arien auf dem Weg zu einer Oper. Eine japanisch-burkinische Koproduktion (Cinq arias en route pour un opéra. Une coproduction japano-burkinabè), Ouagadougou (Africa Libre) 27.1.2021, https://www.africalibre.net/artikel/121-funf-arien-auf-dem-weg-zu-einer-oper; Günther Lanier, Là-bas ou ici – ob jetzt hier oder dort… (Là-bas ou ici…), Ouagadougou (Africa Libre) 12.5.2021, https://www.africalibre.net/artikel/158-la-bas-ou-ic-hier-oder-dort; Günther Lanier, Maï Lingani als ferne Mutter. Keiko Fujiies japanisch-afrikanische Oper entfaltet sich (Maï Lingani comme mère lointaine. L’opéra africo-japonaise de Keiko Fujiie fait son chemin), Ouagadougou (Africa Libre) 23.3.2022, https://www.africalibre.net/artikel/126-mai-lingani-als-ferne-mutter-oder-keikos-oper-entfaltet-sich. Les trois articles ont été publiés sur Radio Afrika mais n’y sont malheureusement plus disponibles. Les voir donc sur mon site www.africalibre.net.

[11] C’était au temps de la colonie française. La Haute-Volta venait tout juste d’être reconstituée en tant que colonie. Georges Konseiga fut le premier président de l’Assemblée territoriale (aussi appelée Conseil général).

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